Il n’y a rien de pire qu’une décision non prise

Après avoir écouté longuement des dirigeants confrontés à des moments de bascule, une autre chose est apparue — plus discrète encore.

Dans une période de grands changements comme celle que nous traversons aujourd’hui, ce qui fait réellement problème n’est pas tant la mauvaise décision que l’absence de décision assumée.

La gouvernance semble mettre tout en place :
les analyses sont faites, les scénarios identifiés, les conseils mobilisés.
Et pourtant, rien ne se tranche vraiment.

La gouvernance semble pourtant tout mettre en place :
les analyses sont faites,
les scénarios identifiés,
les conseils mobilisés.

Et pourtant, rien ne se tranche vraiment.

La décision est sans cesse repoussée, déplacée, requalifiée.
On attend un signe supplémentaire.
Un alignement parfait.
Une garantie.

Ce temps d’attente peut donner l’illusion de la prudence.
Mais il produit autre chose.

Peu à peu, la non-décision s’installe comme une position à part entière.
Elle génère des tensions diffuses :
des conflits de gouvernance,
des incompréhensions,
une fatigue collective,
et souvent un sentiment intérieur de décalage.

Ce qui n’a pas été décidé continue d’agir.

Dans les entretiens, certains disent :
« J’ai l’impression que tout est figé. »
D’autres :
« Je sais ce que je vais faire, mais je n’y arrive pas. »

Ce blocage n’est pas un manque de courage.
Il ne relève pas non plus d’une incapacité à décider.
Il signale souvent qu’une part de la décision n’a pas encore trouvé sa place symbolique.

Car décider, dans ces moments-là, n’est pas seulement produire un choix rationnel.
C’est accepter les conséquences subjectives de l’acte.
C’est consentir à une nouvelle place — pour soi, pour les autres, pour l’entreprise.

Tant que cette place n’est pas assumée, la décision reste en suspens.
Et ce suspens a un coût.

Non visible immédiatement.
Mais bien réel.

C’est pourquoi, dans certains moments décisifs, le véritable enjeu n’est pas d’accélérer,
mais de donner un lieu et un temps à l’élaboration,
afin que la décision puisse advenir comme un acte —
et non comme un compromis de plus.

La non-décision n’est jamais neutre.
Elle est déjà une manière de décider.
Souvent, la plus coûteuse.

-- Cet article fait partie d’une trilogie consacrée aux moments décisifs :
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